Titre commun : « Quand l’État s’endort ? Vie étatique nocturne et gouvernance nocturne dans les États en crise »
Argumentaire général
Lorsque la nuit tombe, un autre visage de l’État émerge. Invisibilisé, mal documenté, souvent perçu comme le moment de repos ou d’inactivité des structures administratives et politiques, le temps nocturne est pourtant un moment d'intenses reconfigurations du pouvoir : prises de décision en coulisses, absence ou mutation des formes de contrôle, activité criminelle accrue, gouvernance par le silence ou la violence, formes hybrides de pouvoir, mobilités informelles, économies alternatives, pratiques de survie, etc.
Ce projet interdisciplinaire explore les formes de gouvernance nocturne, entendue comme l'ensemble des dispositifs, comportements, institutions ou contre-institutions qui agissent, contrôlent, résistent, produisent ou délitent la gouvernance pendant la nuit, dans les États en crise, en particulier sur le continent africain mais également au-delà.
L’ouvrage et la revue EGI s’inspirent des travaux du chercheur Denis Augustin Samnick sur la prison centrale de Makala à Kinshasa, et de son interrogation fondatrice : « Que se passe-t-il lorsque la nuit tombe sur la prison ? ». La nuit à Makala, c’est l’espace-temps des évasions, des violences extrêmes, du relâchement des normes et de la mutation des équilibres de pouvoir.
Plus généralement, l’État vampirisé (Bisa 2019 et 2021), en crise et Kleptocratique (Mambi 2021) est un État aux temporalités disjointes, dont la nuit révèle une gouvernance parallèle, alternative et qui facilité les acteurs concurrents de l'État de s'associer aux préposés tuteurs de l'État-bébé (Emile Bongeli 2013) pour agir en son nom, avec ses moyens mais contre ses intérêts.
Pourquoi, durant les dix dernières années, les évasions massives à la prison, les assassinats ciblés dans nos quartiers ou les prises de villes stratégiques par les forces rebelles se font-ils majoritairement la nuit ? Pourquoi certaines décisions politiques ne sont-elles légitimées qu’à la faveur de l’obscurité ou négociées à huis clos dans des espaces nocturnes ? Pourquoi l’administration publique semble-t-elle s’évanouir une fois la nuit tombée ? Que deviennent, la nuit, la police, les services de santé, la circulation routière, l’électricité, la sécurité, l'économie ? Qu'est ce qui se passe la nuit dans nos eaux, forêts, carrières, champs, cimetières, carrefours, lignes des batailles et autres frontières ?
Axes thématiques (non exhaustifs)
1. Gouvernance carcérale nocturne
- Études empiriques sur les prisons pendant la nuit,
- Surveillance, contrôle, évasions, violences, mutations du pouvoir carcéral ;
- Études de cas.
2. Pouvoirs publics et administration nocturne
- Continuités ou discontinuités des services publics la nuit,
- Transformations des rôles policiers, militaires, douaniers et administratifs ;
- Pratiques de « veille institutionnelle » ou d’abandon stratégique.
3. Temps nocturnes de la guerre, de la diplomatie et du renseignement
- Études sur les offensives militaires, négociations secrètes, frappes nocturnes,
- Chrono politique de la guerre : Pourquoi frapper la nuit ? ;
- Diplomatie de l’ombre : accords négociés dans la discrétion nocturne.
4. Criminologie et nuit
- Criminalité urbaine ou rurale pendant la nuit,
- Économie informelle nocturne (trafic, contrebande, marchés noirs) ;
- Études sur les violences sexuelles, les disparitions, les crimes rituels.
5. Économie nocturne et climat
- Climat de la nuit : impact sur les modes de vie, la sécurité, les flux,
- Économie du sommeil, travail de nuit, économie de l’insécurité ;
- Déforestation nocturne, exploitation minière clandestine, pillage des ressources.
- Comptabilité carbone des activités nocturnes : une question oubliée ?
6. Psychologie, sociologie et médecine de la nuit
- Études sur le stress des agents publics de nuit,
- Conséquences physiologiques et mentales du travail de nuit ;
- Santé mentale nocturne, planification familiale et rapports sociaux nocturnes ;
- Médecine d’urgence, pharmacologie et approvisionnement nocturne ;
- Perceptions sociales de la nuit dans les quartiers précarisés ;
- Imaginaires collectifs et idées de la sorcellerie, fétiches et magies nocturnes.
7. Épistémologie et savoirs de la nuit
- Étudier l’État à travers le prisme temporel : que fait la science de l’État de la nuit ?
- Méthodologies pour documenter et analyser la gouvernance nocturne ;
- Savoirs populaires, magico-religieux, ou stratégiques autour de la nuit.
Appel à contribution n°1 : OUVRAGE COLLECTIF
À paraître chez Academia (Louvain-la-Neuve)
Cet ouvrage réunira une série de sept contributions originales, basées sur des enquêtes empiriques solides (qualitatives, quantitatives ou mixtes), qui interrogent la vie étatique nocturne dans des contextes de crise, de conflit ou de mutation politique.
Les chapitres peuvent porter sur un pays, une ville, une institution, ou développer des analyses transversales ou comparatives.
Appel à contribution n°2: REVUE EGI (n°1-janv-mars 2026)
La Revue EGI - Études sur la gouvernance et les innovations
Le premier numéro 2026 de la revue EGI adoptera comme dossier central : « Gouvernance nocturne et transformation des pouvoirs publics ».
Ce numéro est une plateforme de réflexion autour de la gouvernance nocturne, notamment en lien avec l’innovation, les réformes, les crises institutionnelles et les formes de souveraineté discrète.
Les articles sont attendus pour leur approche originale, leur rigueur méthodologique, et leur capacité à interroger l’innovation publique, la gouvernance informelle ou l’autorité étatique dans des contextes nocturnes.
Dates importantes
Date limite d’envoi des contributions (articles ou chapitres) :
5 décembre 2025 à minuit (heure de Kinshasa)
Adresse d’envoi : revuescientifiqueegi@gmail.com
avec copie à :
og.unikin.upgi1@gmail.com , michel.bisa@unikin.ac.cd et michelbisa@gmail.com
Consignes éditoriales
- Texte en français ou anglais, avec résumés et mots clés
- Maximum 13 pages, interligne simple, police Times New Roman 12.
- Inclure une bibliographie complète, les citations en bas de page pour les chapitres du livre et à la ligne pour les projets d'articles
- Une courte notice biographique reprenant l'affiliation institutionnelle de l'auteur
- Les contributions doivent présenter clairement la méthodologie employée. Si vous recourez à une IA, prière le citer....
- Un résumé de 300 mots max. (en français et en anglais)
- Les textes seront testés dans des logiciels anti-plagiat et de détection de l'IA
Comité Scientifique
Un comité scientifique pluridisciplinaire, composé de chercheurs en sciences politiques, criminologie, économie, psychologie, urbanisme, études environnementales et guerre, assurera l’évaluation en double aveugle des textes.
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